Ce premier roman de l’auteure flamande, paru en 2016, est une véritable bombe littéraire, dont la lecture nous laisse nauséeux, tant les scènes sont décrites avec un cynisme glaçant et une violence inouïe.
En 1988, seuls trois enfants sont nés à Bovenmeer, petit village flamand : Eva, Laurens et Pim. « Les trois mousquetaires » deviennent inséparables durant leur petite enfance, d’autant plus que l’institutrice a dû créer une classe annexe uniquement pour eux.
La vie familiale d’Eva est un véritable cauchemar. Sa mère, qui cache des bouteilles dans le poulailler, est souvent trop ivre pour préparer les repas et finit parfois dans le panier du chien pour cuver son trop-plein de pinard. Pathétique, tout comme son père, également alcoolique, qui, dans son atelier jonché de cadavres de bières, lui explique comment installer un nœud coulant au-dessus d’un escabeau pour ne pas rater son suicide.
Pour échapper au mal-être de leurs parents, son grand frère, dont le jumeau est mort à la naissance, se passionne pour les insectes, tandis que sa petite sœur Tessie, devenue anorexique, développe des TOC. Des heures durant, elle tape sur le clavier d’un ordinateur qui n’est pas branché.
Alors Eva, qui se sent chez elle ailleurs, se jette à corps perdu dans son amitié pour Pim et Laurens et se laisse manipuler et humilier, pour échapper à la solitude, pour rester dans la bande.
Mais au fil des années, rythmées par des jeux interdits de plus en plus élaborés, leurs relations, insidieusement, se fissurent.
Durant l’été 2002, les deux garçons demandent à Eva d’imaginer une énigme quasi insoluble, qu’ils soumettront aux plus jolies filles du village avec une règle simple : elles ont le droit de poser des questions mais à chaque erreur, elle devront enlever un vêtement. Eva assiste à la fois comme arbitre et complice malgré elle à ce jeu pervers, pour que ses amis ne la rejettent pas. Mais ce jeu finira par déraper dans une cruauté sans nom… et mettre définitivement fin à leur amitié.
Treize ans plus tard, Eva, qui enseigne les arts plastiques à Bruxelles, reçoit une invitation de Pim pour célébrer le 30e anniversaire de son défunt frère. Elle retourne donc dans son village natal. Pour se venger de ce qu’elle a subi lors de cet « été meurtrier », alors qu’elle avait 14 ans. Et cette fois-ci, c’est elle qui va dicter les règles.
Un roman noir phénoménal construit entre le présent, qui défile d’heure en heure, et l’été 2002, où tout a basculé. Racontée par Eva, dans un style cru et hyperréaliste, l’histoire décrit, avec un suspense parfaitement maîtrisé, l’évolution d’une amitié entre adolescents qui dérape et finit dans une violence sans nom.
Editions Actes Sud, 2018
Titre original : « Het smelt »
Traduit du néerlandais (Belgique) par Emmanuelle Tardif
A propos de l’auteure
Après des études de cinéma, Lize Spit, née en 1988, enseigne l’écriture de scénarios. Immense succès de librairie, ce roman a remporté de nombreux prix en Belgique et aux Pays-Bas. Traduit dans dix-neuf langues, il a été porté à l’écran par Veerle Baetens en 2024.
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