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Glen Affric, Karine Giebel


Ce thriller psychologique est un long, très long cri de désespoir.


Celui de Jorge, condamné à perpétuité et derrière les barreaux depuis seize ans pour un viol et un double meurtre qu’il n’a pas commis. Piétiné, écrasé, humilié par ses codétenus et ses gardiens, il tente de survivre dans une jungle où la violence est omniprésente.


Lorsque sa demande de libération conditionnelle est enfin acceptée, il sait qu’il ne sort pas en homme libre. Il n’a pas été innocenté et aux yeux de tous, dans son village, il demeure un criminel.


Celui de Léonard, un adolescent pas comme les autres, qui ne sait ni lire, ni écrire et qui craint d’éteindre la lumière quand vient la nuit.


A l’école et dans la rue, il subit les insultes, les humiliations, les coups. « Triso, bâtard, dégénéré, connard » : c’est ainsi que les autres l’appellent parce qu’il est différent. Et donc une proie. Léo est un colosse, plus grand et plus fort que ses ennemis mais il encaisse, ne se défend pas parce qu’il est psychologiquement fragile et totalement inoffensif. Il sait « qu’il y a une anomalie dans sa tête » (« je suis un idiot, un imbécile, un crétin, je n’ai pas de cervelle »). Alors Léo se mutile à chaque fois qu’on lui fait du mal. Il aimerait disparaître. Etre ailleurs. A Glen Affric. Un endroit idyllique, en Ecosse. Avec Jorge, son frère qu’il ne connait pas mais qui viendra le libérer de ses démons.


Celui de Mona, dont le mari s’est pendu dans la grange, qui attend que son fils Jorge soit libéré parce qu’elle sait qu’il est innocent. Une femme remarquable devenue « la mère de l’assassin » et rejetée par tout le village.


Au parloir de la prison, elle lui parle depuis des années de Léonard, cet enfant qu’elle a trouvé dans un fossé (le jour de la Saint-Léonard), qui portait des vêtements sales et déchirés, le visage plein de boue et de terre. Un animal blessé qu’elle a adopté et qui, à cause de ses multiples sévices, a le cerveau abîmé. « Des dommages irréversibles », lui a dit le neurologue. Elle n’a jamais eu le courage de dire à Léo que Jorge est dans une cellule et non plus à Glen Affric, d’où il avait envoyé une carte postale, il y a longtemps.


Celui d’Angélique qui, depuis que ses parents se sont tués dans un accident de voiture, vit avec son oncle, un monstre qui la séquestre, la menotte, la frappe et la viole. Sa mère lui disait qu’elle n’était pas comme les autres, qu’elle avait un cerveau un peu paresseux, un corps un peu maladroit, qu’elle était née différente mais que ça ne l’empêcherait pas d’être heureuse. Mais sa mère se trompait. Devenue mutique, elle attend que les ténèbres l’ensevelissent.


Jorge, Léonard, Mona, Angélique : quatre innocents qui vivent l’horreur au quotidien. Des vies gâchées, brisées.


Mais ce roman est aussi l’histoire d’une amitié incroyable, d’une bienveillance, d’une solidarité entre un adolescent différent et « son grand frère » - même s’ils ne sont pas du même sang -, qui décident de se protéger mutuellement et de se battre ensemble contre les injustices dont ils ont été victimes. Parce que l’espoir existe.


« On ne peut pas mourir sans avoir vu Glen Affric » répète Jorge à Léo pour qu’il s’accroche à la vie. Oui, mais après ? Mourir là maintenant ou vivre ici pour l’éternité ?

Ce roman sombre et très dur de 750 pages nous prend aux tripes et nous arrache des larmes tellement il est bouleversant. Karine Giebel, la reine incontestable du thriller français, décrit de façon magistrale le harcèlement scolaire, le milieu carcéral, la bêtise humaine, la violence, l’inceste, l’injustice.

Au fil du récit, on s’accroche à la moindre étincelle d’espoir, on croit retrouver un peu d’humanité. Mais à chaque rebondissement de l’intrigue, on est à nouveau pris au piège, assailli par des sentiments de colère et de révolte face à la descente aux enfers des personnages.


Un thriller percutant qui nous maintient en apnée de la première à la dernière page. Malgré quelques longueurs et répétitions (notamment dans les chapitres consacrés à Angélique), le rythme et l’écriture sont parfaitement maîtrisés et les personnages sont criants de vérité.


Karine Giebel a une plume magnifique et un immense talent.


Editions Plon, 2021


A propos de l’auteure


Les polars de Karine Giebel ont reçu de nombreuses récompenses dont, notamment, le Prix Intramuros du festival de Cognac et le Prix SNCF du polar pour « Les Morsures de l’ombre » (2007), le Prix du meilleur roman français, Festival Polar Cognac 2012 pour « Juste une ombre » et le Prix Book en Stock 2019 dans la catégorie « Thriller » pour « Toutes blessent la dernière tue ». « Ce que tu as fait de moi » (2019) s’inscrit aussi dans la liste de ses succès.

Ses livres, traduits dans une douzaine de langues, se sont vendus à plus de deux millions d’exemplaires à ce jour.

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