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Le syndrome du canal carpien, John Boyne


Une comédie satirique et impitoyable de notre époque et de l’omniprésence des téléphones portables et des réseaux sociaux.

Bienvenue au sein de la famille britannique dysfonctionnelle des Cleverley !


George, le père, animateur vedette de la BBC depuis trente ans, peut se vanter d’avoir interviewé toutes les célébrités de la planète et d’avoir été invité chez Charles et Diana (« une femme charmante, folle comme un lièvre en mars »). Tenu en grande estime par la gauche autant que par la droite, il est persuadé d’être indéboulonnable car, selon sa propre expression, il est un trésor national.


Sa femme, Beverley, est une romancière populaire, « incroyablement créative » mais qui, n’ayant pas le temps d’écrire elle-même ses livres (des romans à l’eau de rose style Barbara Cartland), fait appel à des prête-plumes qu’elle méprise et tyrannise parce qu’ils ont plus de talent qu’elle.


Arrivent ensuite les trois enfants qui n’envisagent pas un seul instant de quitter le domicile familial où l’argent coule à flot : Nelson, 22 ans, harcelé par le directeur de l’école où il enseigne, qui porte des uniformes pour vaincre son anxiété sociale et séduire les femmes (ou les hommes, parce qu’il s’interroge toujours sur sa sexualité) ; Elizabeth accro aux réseaux sociaux et obsédée par le nombre de ses followers, et qui sous un faux compte (@La VéritéEstUneEpée) insulte tout le monde (d’Elon Musk à Greta Thunberg, en passant par Salman Rushdie) dont sa propre famille, quand elle ne dialogue pas avec elle-même ; enfin, Achille, 17 ans, prostitué de luxe auprès d’hommes mûrs choisis sur un site de rencontre avec lesquels il ne couche pas mais qu’il arnaque contre la promesse de son silence.


Tout bascule lorsque George poste un tweet anodin qui va déclencher une série de réactions outrées et le clouer au pilori. « Raciste, homophobe, transphobe, antisémite, nazi, maccarthyste… » : il ne fait pas bon de se retrouver sous les projecteurs des Twitterati.


Ce roman qui se déroule sur cinq jours est hilarant !


Les dialogues sont percutants, savoureux, jubilatoires et tous les personnages (certes caricaturaux) sont croqués avec beaucoup d’humour : l’amant de Beverley, un jeune danseur ukrainien qui élève Ustyn Karmaliuk, une tortue centenaire nourri aux After Eigh, le petit ami d’Elizabeth qui ne se lave jamais (« le corps humain est autonettoyant ») et se définit comme non binaire, le producteur de George, diplômé de Cambridge, qui pense que Trotski joue dans l’équipe de Liverpool…


L’auteur porte un regard lucide et féroce sur les dérives et décadences de notre société et dénonce tour à tour le politiquement correct, la bien-pensance, le wokisme, le lynchage textuel et l’inculture des nouvelles générations.


Pour reprendre la citation d’Umberto Eco : « Les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d'imbéciles qui, avant, ne parlaient qu'au bar, après un verre de vin et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite alors qu'aujourd'hui ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel. C'est l'invasion des imbéciles. »


Morale de cette histoire : pour vivre heureux, il faut vivre déconnecté.


Editions JC Lattès, 2021

Traduit de l’anglais (Irlande) par Sophie Aslanides

Titre original : "The Echo Chamber"


A propos de l’auteur


Né à Dublin, John Boyne, auteur de romans pour adultes et pour adolescents, a notamment publié « Le garçon en pyjama rayé », vendu à plus de six millions d’exemplaires dans le monde avant d’être adapté au cinéma, « Les fureurs invisibles du cœur » et « L’audacieux Monsieur Swift ». Ses livres ont été récompensés par plusieurs prix littéraires en Irlande et à l’étranger.

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