top of page

Les heureux du monde, Stéphanie des Horts


Scott Fitzgerald s’est-il inspiré de la vie de ses proches amis Gerald et Sara Murphy pour écrire « Tendre est la nuit » ? C’est en tout cas ce que lui reproche Sara dans une de ses lettres datées de 1934 : « Comment as-tu me faire ça ? Faire de nous les héros de ton livre ? Tu nous as trahis (…) Tu es un monstre qui a vampirisé notre vie, nos soirées ».


Mais qui est ce couple de légende incarné par Nicole et Dick River dans le roman à succès de Fitzgerald ?


Issus de la grande bourgeoisie new-yorkaise, les Murphy et leurs trois enfants fuient l’Amérique de la prohibition, comme beaucoup de leurs compatriotes, pour s’installer à Paris en 1921. Riches et étincelants, ils courent les galeries, dansent le fox-trot, le charleston et le tango jusqu’à l’aube et deviennent la coqueluche du tout-Paris. Lui, peintre talentueux mais raide et froid, elle, lumineuse, sensuelle et d’une grande beauté qui attire les hommes mais reste fidèle à son mari.


Et la fête continue sur la « French Riviera ». Dans leur maison du Cap d’Antibes (« La Villa America »), véritable paradis qui embaume la lavande, ils reçoivent leurs illustres amis : Cole Porter et son piano, John Dos Passos, Ernest Hemingway et ses femmes, Scott et Zelda Fitzgerald, Dorothy Parker, Rudolf Noureev, Pablo Picasso (fou amoureux de Sara) ou encore Cocteau qui pleure la mort de Raymond Radiguet.


La création artistique bouillonne, les peintres avant-gardistes côtoient les écrivains incompris et le champagne coule à flots.

Tous sont sous le charme de ce couple tellement beau, tellement riche, tellement généreux et à la vie parfaite.


Mais ce bonheur insouciant, voire indécent, cache de nombreuses failles.


L’excentricité de leurs convives devient pesante pour les Murphy. Le couple est épuisé par les frasques de Zelda, devenue incontrôlable et qui va peu à peu sombrer dans la folie, par Scott dévoré par l’alcool, par les adultères d’Hemingway. Disputes, rivalités, jalousie et intrigues amoureuses sonnent le glas de ces années folles.


Les murs de la Villa America se fissurent. Gerald Murphy ne peint plus, sa créativité est tarie et sa fortune a fondu. Et en 1929, la tragédie s’abat sur ce couple mythique qui cache des secrets.


« Tu nous aimais tous les deux. Tu voulais être moi. Tu voulais être lui. Tu voulais notre vie (…) Tu t’es dit qu’à nous fréquenter, on déteindrait sur vous. Cela s’est révélé faux, ça t’a surpris et tu as choisi de voler notre vie, de l’altérer. (…) Je ne veux plus de toi dans ma vie. Je veux que tu disparaisses » écrit Sara à Scott Fitzgerald en juillet 1934 lors de la publication de « Tendre est la nuit ».


Dans ce roman extrêmement documenté, Stéphanie des Horts ressuscite les années folles à travers l’histoire de Gerald et Sara Murphy, un couple enchanteur qui a tant compté dans la vie des Fitzgerald, d’Ernest Hemingway et de beaucoup d’autres artistes de leur temps, même si aucun auteur ne s’est jamais véritablement penché sur leur destin.


Ils étaient beaux, riches et insouciants. Ils étaient les heureux du monde, jusqu’au jour où ce bonheur s’est transformé en cauchemar.


Editions Albin Michel, 2021


A propos de l’auteure


Critique littéraire, Stéphanie des Horts est l’auteure de nombreuses biographies dont notamment « Le secret de Rita H. », « Pamela », «Les sœurs Livanos » et « Jackie et Lee ».

Comments


bottom of page